Des habitudes vont devoir changer à Genève et dans sa région. Avec le nouvel horaire de transports publics, qui entrera en force comme dans toute l’Europe le 15 décembre, l’agglomération genevoise va «rentrer dans une nouvelle ère pour sa mobilité», selon Serge Dal Busco.
Le conseiller d’État chargé des Infrastructures a présenté jeudi, avec la direction des Transports publics genevois (TPG), les principales modifications planifiées. Il a aussi fait le point sur le sens politique qu’il donne à ces bouleversements (lire ci-dessous). Le directeur général des TPG, Denis Berdoz, a, pour sa part, évoqué une «étape tout à fait extraordinaire».
Le tram repasse en France
Le 31 octobre 1958, la ligne 12 était amputée de son tracé entre Annemasse et Moillesulaz, ultime vestige transfrontalier d’un réseau de trams largement binational au début du XXe siècle. Reliant le parc annemassien de Montessuit à la gare CFF de Lancy-Pont-Rouge, empruntant des tronçons appartenant aux lignes 12 et 15, le tram 17 franchira à nouveau la frontière dès le 15 décembre, une première en six décennies. Il s’agit, pour Denis Berdoz, d’un «événement exceptionnel», mais cela devrait être moins le cas à l’avenir puisque le Canton planifie une ligne de tram vers Saint-Julien (dont la construction commencera cet hiver si les oppositions sont aplanies à temps) et une autre liaison ferrée transfrontalière à plus long terme entre le Grand-Saconnex et Ferney-Voltaire.
Le nouveau tram d’Annemasse circulera à une cadence de neuf minutes qui se cumulera sur le tracé commun aux fréquences maintenues de la ligne 12, si bien qu’on verra passer un convoi toutes les trois minutes dans chaque sens sur l’axe de la route de Chêne. Un sacré défilé qui sera aussi un défi pour les usagers voulant franchir perpendiculairement cet axe, avertit Serge Dal Busco. Mais cette offre, conjuguée à celle proposée en parallèle dans les trains du Léman Express, devrait amener de l’oxygène dans ces véhicules aujourd’hui souvent bondés aux heures de pointe — un espace qui devrait toutefois être rapidement comblé par les passagers des trains desservant la nouvelle gare des Eaux-Vives.
Capacités bienvenues
«Durant des années, on a fait jouer au tram un double rôle de RER et de desserte fine, ce qui a causé des problèmes de capacité, analyse David Favre, directeur de l’Office cantonal des transports. Retrouver de l’espace dans les trams est réjouissant, mais on sera vite rattrapé par les nouveaux besoins en mobilité. De plus, le réseau de trams devra continuer à jouer le rôle d’un train en l’attente d’une diamétrale ferroviaire.» Les trams bondés ne sont d’ailleurs pas une exclusivité de la Rive gauche, comme le savent les usagers meyrinois du 18. Ce tram sera désormais doublé jusqu’à Blandonnet, en heure de pointe, par le bus 68 desservant Thoiry.
Si le train soulagera le tram de certains passagers, il devrait aussi lui fournir de nouveaux clients. Tel est l’esprit des responsables des TPG et des services cantonaux de la mobilité quand on les titille sur l’éventuelle rivalité qui pourrait émerger entre la régie publique genevoise et les Chemins de fer fédéraux, appelés à voir leur rôle croître au sein de la mobilité régionale et leur poids grossir dans la communauté tarifaire Unireso, qui rassemble les opérateurs de transports publics autour de tickets et abonnements partagés.
Voilà pour la philosophie. Mais quid de l’arithmétique et de la clé de répartition des recettes d’Unireso en fonction de la répartition des voyageurs? «On a fait des hypothèses et on estime que la part des TPG dans le gâteau reculera de cinq points, passant de 93% à 88%, répond Denis Berdoz. Mais si les changements que nous avons préparés sont une réussite, le gâteau sera plus gros!»
Bus réorientés et renommés
Avec la mise en service intégrale du Léman Express, les quatre stations ferroviaires qui ouvriront leurs portes sur la Rive gauche deviendront autant de pôles de transbordement supplémentaires du réseau local de transports publics. Des lignes existantes seront infléchies pour les desservir, d’autres seront créées. Des voyages de bus sont parfois ajoutés tôt le matin afin de pouvoir attraper le premier train.
«Un tiers de nos lignes de bus – on en compte une soixantaine – sont directement impactées dans leurs horaires et leurs tracés», jauge Denis Berdoz. Avec l’introduction de la cadence au quart d’heure des trains régionaux entre Coppet et Lancy-Pont-Rouge, la Rive droite a inauguré en 2018 cette évolution qui s’y confirme et s’étend au Mandement. Les exemples abondent (voir ci-contre).
Les bus boudent l’alphabet
Une obligation venue de Berne augmente l’impression de chamboulement. La réglementation helvétique exige désormais que les lignes de transports publics soient uniquement désignées par des chiffres, excluant les lettres attribuées aux lignes de campagne, qui deviendront l’apanage des quais. Ce changement sera progressif.
Mais il est déjà en marche. Exit le V, place au 50! Le Z est mort, vive le 52! Le 55 n’est autre que l’ancien U; le 70 succède au S; le 74 est le nouveau P. Il y en a bien d’autres encore. Les dizaines sont attribuées par région. Les bus dans la soixantaine desservent ainsi le Pays de Gex. Il n’y a pas de changement pour les lignes urbaines principales, si ce n’est l’irruption du nouveau tram 17.
Du neuf en dur et en ligne
Les TPG annoncent par ailleurs de nouveaux efforts pour mieux servir leurs clients. Ils ouvriront une nouvelle agence à côté de la gare de Lancy-Pont-Rouge. Leur application pour smartphone sera en outre rénovée, permettant notamment l’achat de titres de transport par carte de crédit ou la recherche d’itinéraires basée sur la circulation en temps réel des véhicules, et non pas leurs horaires théoriques si souvent bafoués. D’autres nouveautés sont attendues sur le site internet et sur le site d’achat en ligne, comme la possibilité de faire bloquer, en cas de vol, sa carte à prépaiement «tpgPay».
Subsides aux confins
La conférence de presse a aussi été l’occasion d’évoquer la colère des maires de la Terre-Sainte vaudoise, exclus d’Unireso ce qui leur vaut un renchérissement des billets (lire notre édition d’hier). Un retour à la normale, selon les autorités genevoises, qui disent avoir été félicitées par le surveillant fédéral des prix.
Quid des Genevois de l’enclave de Céligny? Le Canton leur remboursera le surcoût de leur nouvel abonnement. Il en ira de même pour les Chancynois qui voudraient prendre le train à Pougny, dans l’Ain, ce qui les fait passer par une autre zone tarifaire. Une possibilité semblable sera bientôt offerte via Annemasse aux résidents de Presinge et Puplinge.
Toutes les nouveautés sont détaillées sur le site des TPG.
https://www.tdg.ch/geneve/bus-pg-s-ajus ... www.tpg.ch