Urbanisme, périphérie, suburbia...

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amaury
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar amaury » 08 févr. 2021, 12:33

Il y a plusieurs dimensions entremêlées :
  • Les représentations fantasmées du village (avec l'entraide villageoise, l'espace, la Nature....), d'un côté, et de la "ville pathogène" de l'autre (insalubre, encombrée, etc.)
  • Les dynamiques économiques qui font qu'il est difficile de devenir propriétaire aujourd'hui dans des lieux bien desservis en TC performants
Il ne s'agit pas de dire que les gens sont des idiots. Ils sont pris dans des représentations qui peuvent, pour certaines, être fausses et les faire déchanter. Ainsi, une partie des Gilets Jaunes sont justement des gens qui sont indignés de subir les conséquences négatives de la "non-ville" alors qu'ils sentent que ce mode de vie est considéré comme non-vertueux et estiment qu'ils n'ont pas les moyens de faire autrement.

A l'inverse, il ne s'agit pas de dire, non plus, qu'ils ont parfaitement le choix matériel. Comme dit plus haut, on voit bien que les dynamiques économiques font qu'il est difficile de devenir propriétaire aujourd'hui dans des lieux bien desservis en TC performants... et par extension, s'il est difficile de devenir propriétaire, c'est parce que les prix du foncier sont élevés. Si les prix du foncier sont élevés, le coût de la location l'est aussi. A un moment donné, il n'est plus seulement compliqué d'être propriétaire, il devient aussi "compliqué" d'être locataire, particulièrement pour les familles avec deux enfants ou plus. Cette dimension-là n'est évidemment pas non plus à ignorer.

Pour autant, il y a deux raisonnements qu'on peut exclure, je pense :
  • "Sils le font alors c'est ce qu'il y a de mieux pour eux"
    => quand on est pris dans des représentations, on ne fait pas toujours ce qui est bon pour soi. Mais dans un pays libre, on a effectivement le choix de faire des choses qu'on vit mal par la suite. Un exemple méconnu - je crois - qui illustre l'écart entre "l'attendu" et "l'obtenu" = https://www.liberation.fr/societe/2015/ ... t_1238643/
  • "On est dans un pays libre donc chacun fait ce qui lui plait. Non seulement, y'a pas mort d'homme mais en plus, ils le font parce qu'ils y sont obligés"
    => chacun est libre et c'est le genre de libertés qu'il serait malvenu d'interdire, je trouve ! Mais si les gens subissent les conséquences de la situation, ça me fait dire que la pédagogie en amont n'est pas suffisante. On fait un VRAI choix quand on maitrise les tenants et les aboutissants de ce choix !
... et tout ça, c'est quand on reste à une échelle individuelle. Si maintenant, on passe à une échelle collective, ça devient différent. Dans mes études, on passait en revue les mécanismes et les conséquences (plutôt négatives) de cette occupation du territoire. Mes études, c'était il y a 15 ans. Dans la pratique, si on avance peu sur ce sujet, c'est justement parce que la responsabilité collective se heurte aux attentes et mécanismes individuels. :-\ C'est un peu comme n'importe quel autre sujet qui concerne l'environnement ou le climat...
A quand le retour des trolleys sur l'axe A2 ?!? Pourquoi attendre le TOP ??? En attendant, RDV sur les traces du FOL: http://folsaintjust.free.fr.
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar nim » 08 févr. 2021, 13:31

Et d'où vient l'envolée des prix ? Pour une bonne part de l'aveuglement, la timidité, la corruption des élus locaux, qui demandent au contribuable de financer l'attractivité de certaines zones, à coup d'infrastructures publiques (transports, parcs, etc) et laissent ensuite un petit nombre accaparer le résultat.

S'il n'y avait pas la possibilité de “valoriser” certaines zones par des locations courte durée, ou autres logements de luxe, le prix du foncier en ville s'effondrerait. Et la société s'en porterait pas plus mal, puisque que ces pratiques contribuent très peu à l'économie locale. Même le versement transport des tours de bureaux est négligeable, puisqu'il est indexé sur le coût du transport financé par la collectivité pas sur les profits immobiliers.

Finalement une ville c'est comme un parc naturel. Il y a un équilibre à trouver, entre les besoins des populations qui ont créé un territoire, et ceux qui voudraient faire beaucoup de profits rapides en faisant ce qu'ils veulent de terrains racheté sur ce territoire.
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar NP73 » 09 févr. 2021, 18:04

Salut
nim a écrit :Et d'où vient l'envolée des prix ? Pour une bonne part de l'aveuglement, la timidité, la corruption des élus locaux, qui demandent au contribuable de financer l'attractivité de certaines zones, à coup d'infrastructures publiques (transports, parcs, etc) et laissent ensuite un petit nombre accaparer le résultat.


L'envolé des prix est dû à une différence entre l'offre et la demande.
Pourquoi cet différence ?
Plusieurs chose peuvent l'expliquer.
-Une arrivé de population supérieure au nombre de logement construit.
-Eclatement des cellules familiales.
-L'effet airBnB. Un nombre important de logement sont sorties de la location traditionnel pour faire de la location courte durée.
-Transformation de certain logement en bureau.
-Etc.

Tant que les élus ne prendrons pas les racines du problème, les continueront à augmenter.

@+
nim
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar nim » 09 févr. 2021, 19:05

Bonjour,

NP73 a écrit :L'envolé des prix est dû à une différence entre l'offre et la demande.


C'est un peu plus compliqué que ça puisque par exemple, la théorie de l'offre et la demande suppose que les acteurs ont une connaissance parfaite du niveau de l'offre et de la demande. Or, c'est tout sauf le cas, les prix sont fixés au doigt mouillé, souvent en s'inspirant d'un autre prix fixé au doigt mouillé, et de temps en temps tous les acteurs se rendent compte que c'est devenu n'importe quoi, et les bulles font plop (ce qui ne doit jamais arriver dans un marché théorique parfaitement informé).

C'est pour cela que les vendeurs vont faire le maximum pour pousser le prix du reste du marché à la hausse (puisqu'il sert d'approximation du juste prix) et introduire des facteurs irrationnels comme des prestations “d'exception” ou des starchitects qui perturbent un peu plus le processus d'évaluation de l'offre et la demande côté acheteur. Et c'est pour ça aussi que ça crie au meurtre maintenant que la nouvelle majorité donne un coup d'arrêt à des projets qui auraient pu servir de référent et tirer les prix encore plus haut pour toute la métropole (avec les hypocrites de service qui demandent qu'on les laisse faire ce qu'ils veulent sur leurs terrains, comme si ça n'avait pas d'effets de bord sur tout le reste du marché).

D'autre part on est arrivé à un stade où toutes les demandes ne peuvent être satisfaites, pas juste à cause de Malthus et les affreux xxx qui font plein d'enfants, mais parce que les actions humaines réduisent l'espace vivable sur terre (le covid et le confinement montrent cela de manière assez caricaturale, une erreur quelque part en Chine augmente l'espace de logement nécessaire à chacun pour vivre bien, or l'espace disponible est inchangé).

Donc il doit y avoir des choix politiques sur les demandes qu'on refuse de satisfaire, le seul étalon ne peut être l'argent que les uns et les autres mettent sur la table, vu la répartition des richesses aujourd'hui ça se terminerait très mal pour la majorité des citoyens.

Avec une approche offre et demande, on serait encore en train d'augmenter l'offre de voies d'autoroute à Perrache, pour répondre à la demande d'espace de circulation des véhicules particuliers. Or, on peut aussi agir sur la demande, en arbitrant ce qui est légitime ou pas, et en promouvant des attentes différentes (ce qui revient à déconstruire la représentation de la ville promue par l'ancienne municipalité).
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar BBArchi » 12 mars 2021, 01:56

Le problème semble loin d'être aussi manichéen... :coolsmiley:

Pour alimenter la réflexion, il se trouve que des "sensibilités" peu suspectables d'aller dans un sens collectiviste ont analysé à leur manière et avec leurs filtres ce problème entre autres, mais aussi des problèmes connexes...
Comme quoi, il a fallut attendre que le corps social se mette en branle de façon peu orthodoxe (les Gilets Jaunes) pour que les mécanismes à l'oeuvre soient analysés, dans un premier temps, à défaut d'être l'objet d'une critique (au sens analyse critique permettant de comprendre les fonctionnements) et de conclusions sous forme d'actions correctives.

Ça fait la une de bon nombre de journaux locaux, c'est dire la résonnance de l'instant ... ::)
C'est là : https://www.institutmontaigne.org/publi ... erritoires

Le rapport : https://www.institutmontaigne.org/resso ... apport.pdf

Auteur
Paul Hermelin Président du Conseil d’administration de Capgemini

Paul Hermelin commence sa carrière dans l'administration française à la direction du budget et au sein de cabinets ministériels. Entré dans le Groupe Capgemini en 1993, il devient président-directeur général en 2012. Depuis mai 2020, il est président du Conseil d’administration de Capgemini SE. Paul Hermelin est un ancien élève de l’École Polytechnique et de l’École Nationale d’Administration.

La photographie de la France aujourd’hui est celle d’un pays profondément déséquilibré : les quinze plus grandes métropoles concentrent 81 % de la croissance économique alors qu’elles ne représentent que 30 % de la population française. Les "territoires épars", c’est-à-dire les territoires situés en dehors des grandes métropoles, représentent - quant à eux 70 % de la population de notre pays et connaissent une croissance économique, ainsi qu’un niveau de vie en stagnation voire en déclin.

Reflet du dynamisme économique national, la mue de nos métropoles en pôles d’attractivité économique, démographique et culturelle, de rangs européen et mondial, est un atout indéniable pour notre pays. Pour autant, cette métropolisation a favorisé l’émergence d’un sentiment d’abandon dans les territoires épars qu’il convient d’interroger.

Les territoires épars

Dans cette étude, le terme "territoires épars" désigne les territoires situés en-dehors des grandes métropoles, notamment les villes moyennes et la France rurale. Cette France des territoires épars représente 98 % de la superficie du territoire national.

De manière générale, ces territoires pâtissent de moins bonnes infrastructures de réseaux et d’un faible nombre de centres décisionnaires d’entreprises importantes qui les rendent plus vulnérables aux crises.

Ces territoires renvoient néanmoins à des situations très diverses avec des désavantages structurels qui leurs sont propres.

À titre d’exemple, des villes moyennes, comme Beauvais ou Compiègne, sont satellisées par des métropoles, alors que d’autres, comme Aubenas ou Aurillac, bénéficient d’un environnement urbain faible et ont ainsi un rayonnement fort sur le territoire alentour.

Ces territoires pâtissent d’un faible maillage entrepreneurial et de moins bonnes infrastructures de réseaux, qui les rendent particulièrement vulnérables aux chocs économiques. En conséquence, la crise économique et sociale née de l’épidémie de Covid-19 risque de creuser fortement cet écart territorial.

Le plan de soutien à l’économie "France Relance" offre une rare occasion de mettre un terme à cette trajectoire préoccupante, de soutenir les filières productives qui constitueront demain des relais de croissance pour l’économie nationale, de bâtir des infrastructures qui faciliteront le rééquilibrage des territoires, et d’apporter des réponses face au sentiment de déclassement qui mine et appauvrit les ambitions individuelles et collectives.

Fruit d’une réflexion d’une année, ce rapport, présidé par Paul Hermelin, président du Conseil d'administration de Capgemini, invite à repenser l’action publique et à favoriser une politique de différenciation pour renforcer durablement la cohésion à l’échelle nationale. Seule une politique volontariste permettra de réussir ce rééquilibrage. Cette dernière doit notamment permettre un renforcement durable et structurel de l’attractivité économique des territoires épars, et offrir un avantage comparatif aux Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI) et aux Petites et Moyennes Entreprises (PME) qui y sont implantées.

En s’appuyant sur les exemples de l’Allemagne et de l’Italie du Nord, ce rapport identifie plusieurs priorités d’action afin de renforcer l’égalité entre les territoires, et entre les Français.


Investir dans les infrastructures numériques : un levier pour l’interconnexion et l’émancipation économique des territoires

Les travaux d’élargissement de la couverture numérique du territoire (haut débit/5G) constituent une opportunité unique pour réorganiser l’activité économique en faveur des milieux épars. Dans cette perspective, la France doit consacrer davantage de moyens pour accélérer le développement de la couverture 5G dans les territoires épars, à l’instar de l’Allemagne qui consacre 5 milliards d’euros de son plan de relance à l’équipement des zones peu denses. La digitalisation est un levier pour renforcer la qualité et la densité des services publics sur le territoire, et permet également la délocalisation de certaines activités depuis les grandes métropoles, à l’heure où la pandémie de Covid-19 a accéléré le recours massif au télétravail.

L'extension du télétravail offre, d’une part, la possibilité d’une meilleure répartition de la population - et donc de la consommation - sur le territoire, et d’autre part, un meilleur accès aux ressources humaines pour les entreprises implantées dans les milieux épars. C’est pourquoi nous proposons qu’un travail de recensement et de rénovation des bâtiments, en particulier ceux appartenant aux collectivités publiques et pouvant accueillir de nouveaux espaces de coworking, soit engagé pour accompagner le développement du télétravail dans les territoires.


Rénover l’habitat et les mobilités pour renforcer l’attractivité des territoires tout en respectant les contraintes environnementales

Un plan de rééquilibrage territorial ne doit pas s’accompagner d’une aggravation de notre empreinte environnementale. Au contraire, cela doit être l’occasion d’accélérer le verdissement de notre économie au niveau national. Pour ce faire, deux leviers sont à privilégier :

l’habitat ;
la mobilité.

D’abord, l’accélération de la rénovation énergétique du parc de bâtiments existant, dont le rapport de l’Institut Montaigne Rénovation énergétique : chantier accessible à tous (2019) a fait l’objet, est essentielle. Aujourd’hui, la multiplicité des acteurs réduit la lisibilité des dispositifs d’incitation à la rénovation énergétique. C’est pourquoi nous proposons la création d’un guichet territorial unique, qui serait porté par l’ADEME, pour faciliter le recours des citoyens à ces solutions et ainsi intensifier la campagne de rénovation énergétique.

En termes de mobilité, une politique de différenciation est nécessaire pour prendre en compte la réalité des villes moyennes et des zones éparses. Ces territoires ne disposent pas de budget d’investissement permettant d’appuyer aussi efficacement que les métropoles le déploiement d’infrastructures électriques, et notamment de bornes de recharge. Face à cette inégalité, un soutien financier de l’État est nécessaire afin que le passage à une mobilité bas carbone se fasse équitablement sur l’ensemble du pays. Par ailleurs, le développement d’une filière hydrogène structurée autour d’une mobilité favorisant les territoires épars, et notamment les liaisons inter-villes (autocars-TER), est crucial.

Enfin, à l’instar des modèles allemand et italien, il est nécessaire de bâtir un réseau ferroviaire du quotidien pour limiter les trajets en voiture. Le développement de lignes de train du quotidien, dont la vitesse n’excèderait pas 250 km/h, permettrait une meilleure répartition de l’activité économique tout en favorisant la décarbonisation du transport. Une telle orientation serait, par ailleurs, relativement peu coûteuse puisqu’elle s’appuierait largement sur le développement d’infrastructures déjà existantes.


Soutenir le développement d’une offre de formation universitaire et professionnelle d’excellence dans les territoires

Les investissements dans le capital humain définiront pour partie la capacité de nos territoires à rebondir après la crise et à soutenir les secteurs d’activité qui constitueront les relais de croissance. Or, les établissements d’enseignement supérieurs sont aujourd’hui concentrés dans les grandes métropoles françaises. Ce sont plus des deux tiers des étudiants qui sont concentrés dans 22 grandes villes et métropoles, alors que celles-ci ne regroupent que 29 % de la population française. Cette répartition emporte de fortes conséquences sociales et économiques pour les territoires épars.

Le développement, avec parcimonie, d’une offre généraliste d’accès à l’enseignement supérieur dans les territoires doit permettre un accès plus équitable à l’échelle nationale. Ensuite, le renforcement d’une offre locale d’enseignement spécialisé, source de débouchés pour les jeunes diplômés et d’attractivité du territoire, aurait un effet d'entraînement sur l’écosystème local.


Différencier l’action publique, au profit des territoires épars, pour renforcer le tissu local des PME et des ETI

Le rapport appelle à une réflexion sur la fiscalité des entreprises des territoires épars, notamment pour les PME et ETI, afin de leur offrir un avantage comparatif. En particulier, ces entreprises sont pénalisées par la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), comme souligné dans notre rapport ETI : taille intermédiaire, gros potentiel (2018).


Supprimer totalement la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), en priorité dans les territoires épars

En intégrant les investissements productifs, la CVAE défavorise les ETI de manière disproportionnée et limite leur attractivité. Plus une entreprise investit dans un capital productif, plus la CVAE dont elle est redevable augmente. C’est pourquoi nous proposons de supprimer la CVAE dans les villes moyennes et en milieux épars afin de leur donner un avantage comparatif, et ainsi y favoriser l’investissement. Cette suppression doit toutefois s’inscrire dans le respect du principe d’égalité constitutionnelle, qui permet déjà de traiter de façon différenciée des situations fiscales.


Créer un crédit d’impôt de modernisation technologique

La relocalisation d’activités industrielles dans les territoires ne pouvant advenir à court terme, il est nécessaire d'identifier des gains de productivité alternatifs. Alors que la technologie permet de compenser l’éloignement géographique des PME et des ETI situées dans les territoires épars, nous proposons qu’un crédit d’impôt de modernisation technologique (CIMT) leur soit octroyé. Ce crédit couvrirait tout investissement visant à équiper les PME et ETI de la technologie nécessaire pour développer leur production et la distribution de leurs produits. Pour qu’un tel crédit d’impôt soit constitutionnel, il faut cependant veiller à ce que tous les territoires qui enregistrent un retard de numérisation de leurs PME et ETI puissent bénéficier effectivement de ce dispositif.


Favoriser la transmission familiale des entreprises qui créent des emplois dans les territoires

Enfin, l’allégement de la fiscalité du patrimoine permettrait de favoriser à la fois la conservation de l’emploi en France et la transmission du capital productif dans les territoires. Ce dernier ne devrait toutefois concerner que les entreprises dont les emplois sont situés dans les territoires épars, et avec l'impérative nécessité que ces emplois y soient maintenus durant plusieurs années. Pour maintenir l’activité économique dans les territoires, nous préconisons de relever significativement l’abattement sur l’assiette des successions sur le patrimoine de nature professionnelle, jusqu’à 1 million d’euros. Ce dispositif pourrait être inclus dans le Pacte Dutreil, dispositif qui permet de favoriser la transmission d’une entreprise familiale sous certaines conditions, réformé et simplifié.



Je suis loin d'être en accord avec tout, mais "l'idée de la possibilité d'une démarche" est en soi un progrès ...
D'aileurs en parlant de Progrès... ;D
https://www.leprogres.fr/politique/2021 ... -capgemini
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar BBArchi » 13 mars 2021, 00:11

Une sorte de TD avec une application directe et locale de la conversion forcée (?) d'un paysage riche en une énième zone d'activité sans vraiment la moindre idée de faire beau, bien, et surtout en phase avec un territoire...

https://www.leprogres.fr/environnement/ ... -des-haies


Dans un communiqué, en date du 11 mars, le collectif « Quicury, prenons soin de notre territoire » rappelle qu’il « défend l’environnement et s’oppose à l’artificialisation des terres agricoles sur les communes de Vindry sur Turdine, Sarcey, Saint-Romain-de-Popey et Bully ». Il « défend la création d’emplois de qualité, plus particulièrement liés à l’agriculture et à la production alimentaire localisée et durable ».

Dans ce cadre, ils installeront des banderoles, ce vendredi 12 mars, sur une haie qu’ils estiment en péril, à Sarcey, à partir de 16 h.

Ils veulent alerter sur les risques de démarrage de travaux engagés par le Département, entraînant la destruction d’espèces protégées. Ils dénoncent un manque de coordination entre les services de l’Etat et le Département.

Et d’informer que, selon eux, « l’élargissement de la RD67, pour permettre la desserte de l’entrepôt Argan, détruira la haie qui borde cette route sur plus de 500 mètres, ainsi que neuf arbres-gîtes et une mare. Plus de 350 mètres de cette haie font l’objet d’une mesure environnementale.

Cette haie constitue, selon le dossier Argan, des habitats pour plusieurs espèces protégées (chiroptères, tritons crêtés, œdicnème criard, petits gravelots…) Elle ne peut donc pas être détruite sans une dérogation pour la destruction d’espèces protégées et de leurs habitats.

Quicury a déposé un recours gracieux auprès du Préfet de Région le 14 janvier 2021. Mais n’a eu aucun retour . Le Département sera prochainement amené à détruire cette haie et les habitats qui la composent. C’est pourquoi Quicury a adressé un courrier en recommandé à Christophe Guilloteau, Président du conseil départemental, pour l’informer de cette situation. Dans l’attente d’une réponse favorable au maintien pérenne de la mesure environnementale (conservation de 2 700 m² de haie avec 6 arbres gîtes en bordure de la RD 67), le collectif Quicury entend poursuivre sa mission d’information et de lanceur d’alerte lorsque l’environnement est en danger ».


On va poser comme postulat que les promoteurs de l'affaire endossent une responsabilité directe, et "en ne pouvant pas faire autrement" que de poursuivre l'exécution du projet, assument la paternité de l'ensemble des destructions. Finalement, si en 1980 c'était relativement facile de vivre avec ça dans la musette pour arriver au bout du chemin de la vie, en 2021 cela pourrait être beaucoup plus compliqué ; en tout cas, ce sera plus difficile de se cacher derrière un sentiment d'ignorance, alors que les conséquences sont documentées.

On est en plein sur la problématique des lisières, entre deux mondes qui semblent difficilement compatibles. Celui qui s'installe avec armes et bagages (suite classique de l'aménagement en sortie d'autoroute, façon Far West / Oklahoma à conquérir comme en 1850) dans les territoires jusque là structurés d'une façon vernaculaire, ne fait pas vraiment dans la subtilité, la logique et la nuance. Pourtant, ce serait une façon de progresser autrement valorisante tout en faisant du bizness.

Mais il n'est peut-être pas trop tard pour changer d'avis, mh ?
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar BBArchi » 28 mars 2021, 23:21

Un blog bien fourni en matière de réflexions sur le sujet du topic... :)
https://blogs.mediapart.fr/geographies- ... ropolitain

Un livre : Pour en finir avec les grandes villes,

Un auteur : Guillaume Faburel

Que reprochez-vous donc aux grandes villes ?

Guillaume Faburel – Il y a évidemment les maux sociologiques qui commencent à être assez connus tels que la gentrification et la ségrégation, mais surtout l’éviction des plus pauvres. Mais, il existe trois autres types de problèmes moins renseignés et étroitement reliés.

Premièrement, les grandes villes artificialisent de plus en plus les espaces de vie et plus encore l’entièreté des territoires pour les alimenter (ce qui est désastreux du seul point de vue écologique).

Ce qui provoque, et c’est le deuxième problème, une aseptisation de nos existences et de nos expériences urbaines qui sont de plus en plus mal vécues. Sentiments d’accélération sans fin et de stimulations incessantes, sensations d’asphyxie et de saturation, au point d’un rejet anthropologique croissant de certains styles de vie urbains.

Enfin, pour qu’on tienne tous ensemble au même endroit avec les effets écologiques et anthropologiques mentionnés, on doit finalement être dépossédé de notre capacité directe d’action. On délègue notre puissance à des forces politiques et institutionnelles. Ce qui nous fait perdre notre capacité à façonner notre habiter. Au-delà d’un environnementalisme gestionnaire ou d’une écologie punitive, les villes nous font perdre notre autonomie écologique. Par leurs peuplement et densité, les métropoles gouvernent de plus en plus nos corps et augmentent leurs biopouvoirs, nous dépossédant de notre propre puissance. Les démocraties urbaines n’ont donc rien de réellement démocratiques. La métropolisation du monde est un problème fondamentalement politique.

GEM – Vous ne trouvez donc aucune grâce aux villes ?

GF – Je ne suis pas contre les villes, je suis contre la fascination pour la démesure, l’excès de grandeur ainsi que le mythe d’opulence et d’abondance qui se joue derrière et qui est en train de détruire la planète. C’est donc une question de taille. Il faut urgemment un débat sur la taille limite d’une ville.


On est en plein dans le questionnement positif... et avec des pistes de solutions autres que la mise en jardinières hors sol de quelques poireaux condamnés à la peine capitale... >:D

GEM – Quelles solutions envisageriez-vous pour un finir avec les grandes villes ?

GF – À la fin du livre je renvoie à sept orientations qui pourraient faire référence aux sept péchés capitaux du capitalisme mondialisé. Nous n’allons pas toutes les parcourir ici mais je voudrais insister sur quelques-unes.

La première est la nécessité de penser à un rééquilibrage général et populationnel à l’échelle nationale. C’est non seulement tout à fait possible mais surtout à moindre pression écologique. Bien entendu, s’il est question de quitter les villes avec SUV, 5G, piscine chauffée et climatisation, on ne fera que généraliser le problème. Conjointement à ce déplacement, il doit donc y avoir conscientisation des enjeux écologiques consistant à aller dans des espaces plus ouverts au sein d’une nature redécouverte, en abaissant son niveau de besoin et en adoptant des modes de vie plus vertueux.

Aujourd’hui, sans être des Amish, il y aurait par exemple moyen de faire autonomie alimentaire avec entre 700 et 1000 m2/personne, moyennant une agriculture paysanne, éventuellement un petit élevage d’appoint et familial. On monte à 2000 m2 si l’on adjoint espaces de stockage, d’habitations ainsi que quelques services publics de proximité. En multipliant ce chiffre par le nombre d’habitants en France, on arrive à maximum un quart de la superficie nationale, ce qui est bien inférieur au taux d’artificialisation des sols actuel, une fois intégrés tous les espaces de l’agriculture industrielle, de l’extractivisme généralisé et toutes les grandes infrastructures nécessaires aux flux toujours plus lointains. Il y a donc ici un espace du possible.
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Message non lupar nanar » 29 mars 2021, 12:24

Autre extrait :
.... C’est donc une question de taille. Il faut urgemment un débat sur la taille limite d’une ville.

Cette taille limite dépend évidemment des milieux, des écosystèmes, des ressources disponibles. Mais, dans nos contrés, on arrive à un chiffre maximum situé autour de 30 000 habitants. En deçà de ce chiffre, on maintient une diversité des habiters écologiques (petites villes, hameaux, bourgs, villages, villes moyennes), avec décence et humilité, à la fois dans les interdépendances humaines et dans les liens organiques avec le Vivant.

On peut également envisager un plancher aux alentours de 2 000/3 000 habitants si l’on veut commencer à réunir les savoir-faire requis et à nourrir les échanges nécessaires pour faire autonomie. On a ici une fourchette qui me semble comme relevant du souhaitable au regard des défis qui s’annoncent, et quoiqu’il en soit souhaitée par la grande majorité des populations occidentales. D’où certainement le fait que la majorité des Villes en transition s’inscrivent dedans.



Sans être fana des métropoles, je ne trouve guère d'attrait à un monde de petites unités de quelques centaines ou milliers d'individus "à la Faburel" (j'ai vécu les 17 premières années de ma vie dans des groupes humains entre 300 et 30000 personnes)
Si Faburel était prof à Lyon 3, j'attribuerais même à son discours des relents de "pétainisme". :(
Mais il est à Lyon 2; donc à classer plutôt comme tenté par une vie idéalisée sur le Larzac ?

A+
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"Si vous ne considérez pas le vélo urbain comme une partie de la solution pour l'aménagement des villes, vous êtes une partie du problème."
Dernière modification par nanar le 29 mars 2021, 12:38, modifié 1 fois.
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar BBArchi » 29 mars 2021, 12:34


GF – Je ne suis pas contre les villes, je suis contre la fascination pour la démesure, l’excès de grandeur ainsi que le mythe d’opulence et d’abondance qui se joue derrière et qui est en train de détruire la planète. C’est donc une question de taille. Il faut urgemment un débat sur la taille limite d’une ville.


j'attribuerais même à son discours des relents de "pétainisme".

Euh?...

Du pétainisme ? :o Des "relents" ? rhô ...
Pourquoi le point Godwin, direct ?

Il me semble que sa phrase, que j'ai remis en gras, résume parfaitement la problématique à l'oeuvre.

On est très très loin de Pétain et ses affidés qui ont commis tant de choix méphitiques ! Il est urgent de s'emparer du sujet sans le dénigrer et sans tomber dans les arguments utilisés par les promoteurs de l'empilement ... et effectivement, il est urgent de s'interroger sur la taille limite d'une ville, qui peut varier suivant ses caractéristiques locales non transposables d'une ville à l'autre.

Parce qu'une fois qu'on aura tout artificialisé, no way pour le retour en arrière et la remédiation !
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar nanar » 29 mars 2021, 12:47

Oui, il lui parait urgent d'avoir un DEBAT. C'est bien un universitaire, pour l'occasion. ::)
Je l'imagine se faire des ampoules aux mains et se casser les reins pour biner un lopin de terre, et perdre la moitié de ses 5 premières récoltes de subsistance par maladresse, ignorance, et conditions naturelles foireuses. 8)

A+
nanar
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar BBArchi » 29 mars 2021, 17:43

C'est justement avec ces visions réductrices qu'on en est arrivé à un point d'incompréhension total entre les différentes sensibilités, et qu'on assiste à un dialogue entre imprimantes et tournevis. Forcément, avec ou sans prise USB, ça coince.

Puisqu'on en est dans les points godwin :banane: , on va en rajouter : c'est Pol Pot et ses semblables qui pensaient que les intellectuels n'étaient pas des gens convenables, et qu'il convenait de les rééduquer dans les champs... on a vu le résultat, on va essayer de s'abstenir de partir dans cette direction...

Si on veut avance, il faut les 2 mondes, et les faire dialoguer. Et pas seulement entre eux, mais avec les urbanistes qu'il faut faire sortir de la ville et des recettes "éprouvées" enseignées dans des boites à diplomes qui ont beaucoup de mal à sortir des rails.

Cet intellectuel (aux mains prétendument toutes douces et sans cal) dispose de la capacité de réfléchir à autre chose qu'à la façon de se faire des ampoules ; ce qui ne lui interdit pas d'empoigner la faux ou la binette plutôt que les trucs à essence qui puent, qui font un potin d'enfer, et qui ratatinent soigneusement tout le vivant hébergé dans la végétation (d'ailleurs, c'est accessoirement ce qu'il fait, comme pas mal de géographes qui désormais parlent, écrivent, réfléchissent, en s'appuyant sur des relations au concret "consistantes et pas fantasmées"... comme des nouveaux entrants dans le monde agricole avec leurs points de vue différents, qui essaient, se cassent parfois la gueule, mais qui arrivent de plus en plus souvent à des résultats plutôt bons...)

On trouve aussi pas mal de gens dans l'agriculture en lien avec la terre, les mains dans la terre et au contact des bêtes (pas forcément les industriels de la production intensive, aussi), tout à fait à même de soutenir un débat de très bon niveau avec d'autres sensibilités et spécialités pro, et faire le nécessaire pour éviter les sottises court-termistes.

On est à un tournant dans la "représentation" du monde agricole, avec d'autres prises de conscience et surtout d'autres comportements vis à vis du vivant et de la gestion responsable à long terme ; simultanément, s'ajoute le danger des excès, des fanatismes et extrémismes divers qui peuvent tout à fait être utilisés et exploités dans un sens ou dans l'autre suivant les camps... et faire perdurer ou advenir des modèles dangereusement irrémédiables.

Plus concrètement, face à de l'artificialisation de terres végétales pour des valises de dollars ou d'euros, par des équipes peu nombreuses mais qui se comportent comme des criquets d'Afrique, est totalement incompatible avec la notion de préservation et d'entretien du patrimoine. Et l'argument qu'il suffit de pousser les productions agricoles "ailleurs" pour compenser, et qu'il suffit de faire grossir les villes avec toutes les conséquences documentées, est une faillite de l'esprit : c'est la même logique avec la même conséquence non réversible ; la terre est finie, au sens géographique, il n'y a aucune possibilité d'expansion, donc il faut arrêter de faire croire qu'on peut s'appuyer sur une croissance permanente pour bousiller des surfaces en échange d'un chèque.

Alors plutôt que d'opposer les écolos de salon et les producteurs concrets, il est effectivement urgent de réfléchir avec toutes les sensibilités à ce qu'il est urgent de faire en hypercentre comme en périphérie, aux marges extérieures de cette périphérie comme à la lisière de l'hypercentre

Un tout petit exemple de questionnement : est il opportun de s'obstiner à autoriser la "commercialisation" de la moindre parcelle verte à moins de 5 kilomètres de Bellecour pour y poser une poignée d'appartements ? La pression financière est terrible, surtout pour les héritiers qui ne peuvent pas conserver ce bien et payer les droits de succession. Sans tomber dans le collectivisme confiscatoire (genre pendre le dernier bourgeois avec les tripes du dernier spéculateur) comment valoriser ce bien pour éviter toute perte aux propriétaires, et trouver une construction technique, juridique et financière pour éviter la minéralisation totale du jardin (excepté les 2 poireaux en bac béton perché en haut du parking à 2 niveaux de sous sol) ? Comment faire passer ce bien privatif associé à un bien commun (la vision des arbres en débord par dessus les clôtures et leur perception dans le champ visuel du passant fait partie du paysage urbain en tant que "bien commun", la biodiversité qui y trouve refuge devient quoi ? etc...)

Pas simple, hein ?
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar BBArchi » 16 févr. 2022, 23:02

Pour poursuivre la réflexion sur ce qui se passe dans notre pays, maintenant, et qu'il faut infléchir fissa :
https://www.lamontagne.fr/tonnerre-8970 ... l_14082023

Quelques chiffres à l'importance centrale, et beaucoup de points relevant de l'évidence, "dont il faut s'emparer" le plus rapidement et efficacement possible.


Présidentielle
Reportage à Tonnerre, dans l'Yonne : "Je ne crois pas que ces relocalisations tomberont du ciel"

Publié le 14/02/2022 à 19h00

Image

Dans l’Yonne, Tonnerre fait partie de ces villes françaises frappées par la désindustrialisation. Après des années de déclin économique et démographique, habitants et élus locaux espèrent voir le vent tourner. S’ils entendent les promesses de relocalisation, peu osent véritablement y croire.

L’eau turquoise du lavoir et les façades colorées font encore partie de la carte postale. Mais dans la rue principale de Tonnerre (Yonne), on devine le faste passé plus qu’on le perçoit. Les enseignes laissent entrevoir ces beaux jours où le commerce battait son plein, où la population florissait.

De ce temps-là, pas si lointain, il ne reste plus grand-chose. Bon nombre de boutiques ont baissé le rideau, les devantures sont parfois restées telles quelles. "J’aurais aimé connaître Tonnerre il y a quarante ans, on sent que ça a été une belle ville, même si ça s’est dégradé et que les gens sont partis", estime Alain, venu de l’Aube voisine il y a huit ans.

Située à 35 km d’Auxerre, Tonnerre comptait encore 6.000 habitants jusqu’au début des années 2000. Aujourd’hui, il n’en reste que 4.500, à peine. Un déclin démographique notamment corrélé aux difficultés économiques rencontrées par le territoire depuis deux décennies. Ici, la désindustrialisation a frappé fort. Des grandes entreprises ont fermé, les unes après les autres, laissant sur le carreau des centaines de familles.


L'usine Thomson a compté jusqu'à 1.300 salariés

Vingt ans après sa fermeture, l’usine J2T, filiale de Thomson, marque encore les esprits. "À l’époque tout le monde voulait y travailler. Les employés venaient de tout le secteur : Flogny, Saint-Florentin, Montbard (Côte d’Or)… Il fallait voir le nombre de cars qui les amenaient, c’était impressionnant", se souvient Michel Drouville, ancien acheteur, entré chez Thomson en 1972. L’usine spécialisée dans la production de télés en noir et blanc, puis de magnétoscopes, a compté jusqu’à 1.300 salariés au plus fort de son activité. "La vie était dynamique à Tonnerre, vous pensez bien, ça en faisait des familles?! Et on avait beaucoup de sous-traitants. Les gens avaient du pouvoir d’achat, venaient en ville le week-end."

Mais dans les années 80-90, le vent tourne. L’usine de Tonnerre est progressivement écartée du virage technologique et le coût de la main-d’œuvre souffre de la comparaison asiatique. En 2002, le site icaunais est rayé de la carte. "Personne ne pensait que l’usine fermerait, ça a été un gros choc, les gens sont partis", observe Michel Drouville. Lui avait quitté la société en 1992, avant de se reconvertir dans l’insertion sociale. Après Thomson, d’autres entreprises du secteur ont mis la clé sous la porte.

À quinze kilomètres, la fromagerie Paul Renard (145 salariés) a fermé en 2009, à Flogny-la-Chapelle. Même destin pour la cimenterie Lafarge (70 salariés), à Lézinnes, en 2017. Certaines résistent, comme l’historique Compagnie Dumas dont les 45 salariés fabriquent des couettes et oreillers, mais ces désengagements progressifs ont fragilisé le bassin de vie.


Un quart des habitants sous le seuil de pauvreté

Précarité, chômage, baisse démographique, Tonnerre porte aujourd’hui les stigmates de la désindustrialisation. Plus d’un quart des habitants (27 %) vivent sous le seuil de pauvreté, 23 % sont au chômage et plus d’un logement sur cinq était vacant en 2018. "Les gens qu’on voit passer dans la rue, ce ne sont pas des clients, ils passent pour aller aux Restos du cœur trois fois par semaine", relève une commerçante du centre bourg. Le constat est douloureux pour ceux qui ont connu les temps meilleurs, mais la ville n’est pas une exception

Dans une France massivement désindustrialisée, il existe des Tonnerre partout. L’Hexagone a perdu 2,5 millions d’emplois industriels en quarante ans, selon l’Insee. Le pays est même l’un des plus désindustrialisés d’Europe, "les entreprises françaises sont devenues les championnes de la délocalisation", pointe un rapport de France Stratégie remis en 2020 à l’Assemblée nationale. Une politique qui a fait naître un sentiment d’abandon dans les territoires concernés. "Les gens sont partis car il n’y a pas de travail à Tonnerre, il n’y a que des microentreprises. Ceux qui veulent travailler s’en vont et cela a des répercussions sur le commerce, vous voyez dans quel état est le centre-ville", regrette Michel, qui tient avec sa femme la Rose Bleue, une boutique de cadeaux. Après 42 ans d’ouverture, l’heure de la retraite a sonné pour le couple. Ils tentent de vendre depuis un an et demi, sans succès.


Une zone d’activité vide

Les relocalisations promises ici et là dans les discours politiques, le commerçant n’y croit pas trop. "On est loin de l’autoroute, pour qu’il y ait des nouvelles entreprises, il faut qu’elles soient bien situées. Dans la région, les pôles, c’est Dijon et Besançon, même Auxerre a perdu beaucoup d’emplois." Le thème de la réindustrialisation est pourtant omniprésent dans la campagne présidentielle. À droite comme à gauche, les candidats débordent de propositions pour créer de l’emploi et réduire la dépendance mise en lumière par la reprise post-Covid.

À trois mois du premier tour, les Tonnerrois s’affichent partagés entre espoirs et impression de réchauffé. "Je n’y crois pas trop", commence Brigitte derrière son bar. Originaire de Troyes (Aube), elle tient le Balto depuis une quinzaine d’années. "Combien de fois on a entendu que telle ou telle usine allait se réinstaller?? Combien de fois?? Moi je vois rien venir", lance-t-elle aux habitués venus boire le café en ce matin d’hiver. "Les usines, ça fait un moment qu’on l’entend mais non je pense pas, il y a bien une zone mais il n’y a rien qui arrive", renchérit Alain.

La "zone" qu’il mentionne, c’est Actipôle, un parc d’activité de 20 hectares, créé en 2008 à la sortie de la ville par la communauté de communes et censé accueillir des entreprises. Un projet de centrale biomasse devait y voir le jour avec une centaine d’emplois à la clé. Des contestations liées à des questions environnementales ont découragé l’investisseur. Aujourd’hui, la zone est toujours vide. Des porteurs de projets se seraient manifestés récemment. Rien n’est acté. "La plus grosse problématique, c’est le recrutement, on n’a pas de main-d’œuvre qualifiée", regrette Régis Lhomme, élu chargé du développement économique à la communauté de communes, estimant néanmoins que "les choses commencent à bouger depuis un an" sur le secteur.

Image
Créée en 2008, la zone d’activité censée accueillir des entreprises est toujours vide.

Une posture "proactive" pour faire venir des entreprises

"Ce serait à souhaiter que les entreprises reviennent", juge Bernadette, propriétaire d’une mercerie. "On n’a pas besoin d’avoir des grosses usines, plutôt que d’en avoir une à 1.500 personnes, cinq à 200 ce serait pas mal. On a quand même cette zone sous-exploitée. Mais est-ce que les gens sont prêts à revenir??"

"Je ne crois pas que ces relocalisations tomberont du ciel, il y a une concurrence au sein du territoire donc il va falloir aller chercher ces entreprises", considère Cédric Clech, élu maire de Tonnerre en 2020. Plus que les candidats à la présidentielle, c’est lui qui concentre les espoirs. Producteur à Paris, il aspire à redynamiser sa ville et améliorer son image. "J’entends l’attente des habitants, ça me met une pression de dingue, je ne suis pas magicien, mais j’essaie d’être dans une approche où tout est possible."

L’édile défend une posture "proactive" pour convaincre des "petites unités de production" de s’installer, à la faveur d’un foncier peu onéreux. "Ça ne sert à rien d’aller chercher des entreprises qui pourraient embaucher massivement comme Amazon car elles sont fortement subventionnées. Le jour où le modèle économique n’est plus là, elles repartent."

https://www.lyonne.fr/auxerre-89000/act ... _14074940/

Au Pavillon bleu, Christian a, lui aussi, connu l’époque des fermetures et des départs à la pelle. Il garde espoir. "Ce serait bien pour Tonnerre toutes ces relocalisations, j’ai envie d’y croire." Le bar-tabac situé au pied des tours voit défiler toute la journée les habitants du quartier des Prés Hauts. Anis a grandi là, à quelques mètres. Mais à 22 ans, il voit son avenir ailleurs. "Pour les jeunes, au niveau du cadre de vie il n’y a rien. Le soir on fait quoi ?? On va au McDo ?? Même si on me propose un boulot ici, je partirai", tranche-t-il.

Le renouveau de Tonnerre passera aussi par "une offre de vie sociale", le maire le sait. D’autant que la ville accueille depuis peu une école formant notamment aux métiers du jeu vidéo. Des nouveaux habitants plus que bienvenus pour le territoire qui tente de jouer à fond la carte du numérique. "C’est ce qui pourrait permettre de se démarquer", selon Lucas Lacroix, au Centre de développement économique du Tonnerrois. "Il y a deux ans, Tonnerre était au plus bas, mais avec la démocratisation du télétravail, il y a des néoruraux qui viennent s’installer." Des citadins venus se mettre au vert* qui pourraient, aussi, permettre ce rebond tant attendu.

Sophie Bardin
sophie.bardin@centrefrance.com

* https://www.lyonne.fr/tonnerre-89700/ac ... _13864488/
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar BBArchi » 09 janv. 2023, 09:57

Remontée de topic sur la réflexion ; j'ai reçu une invitation du CAUE du Rhône pour une conférence qui devrait intéresser du monde ici, puisque elle porte sur une partie de nos préoccupations et interrogations :
http://communication.caue69.fr/EmailInB ... fOSxnzBSnt
 

Conférence

25.01.2023
 
Aménager les territoires du bien-être

En tournée dans toute la France à l'occasion de la sortie de son nouvel ouvrage, le Collectif PAP fait étape à Lyon !

Le collectif Paysages de l'après-pétrole, en partenariat avec le CAUE Rhône Métropole, vous invite au lancement de son nouvel ouvrage : Aménager les territoires du bien-être. Ce livre présente des expériences de territoires qui prennent la voie d’un autre aménagement, inspiré par le paysage auquel ils sont attachés.
 
Aménager les territoires du bien-être dresse un état des lieux, propose des études de cas et un inventaire des bonnes pratiques d’aménagement du territoire dans le but d’optimiser le bien-être, la santé et la qualité de vie de la population, tout en prenant en compte les enjeux liés au développement durable. 

L’ouvrage décrit l’état actuel des politiques publiques du paysage en termes de vertus de l’approche paysagère (fédératrice, facilitatrice et participative), des défis que cette dernière peut aider à relever (transition énergétique, agroécologie, ville durable) et d’acteurs de sa mise en œuvre (professionnels, élus locaux et populations à sensibiliser).


DEROULÉ DE L'ÉVÉNEMENT

- Présentation de l'ouvrage et de son message par l'auteur Jean-Pierre Thibault, membre du Collectif PAP,

- Dialogue entre les expériences locales présentées dans l'ouvrage : aménagement de la Duchère, périmètres de protection des espaces agricoles et naturels périurbains du Grand Lyon, centrales villageoises photovoltaïques dans le PNR du Pilat, "réseau paysages" Auvergne-Rhône Alpes...)



LE COLLECTIF

Fondé en 2015, le Collectif Paysages de l’après-pétrole rassemble des spécialistes de l’aménagement (agronomes, paysagistes, architectes, urbanistes et chercheurs en sciences sociales…) conscients de la nécessité d’une évolution de notre modèle actuel de développement.

Le Collectif PAP a pour objectif de redonner durablement à la question du paysage un rôle central dans les politiques d’aménagement du territoire, dans un contexte de transition énergétique. Le paysage est le visage d’un projet de société. La transition écologique appelle une transition paysagère, des formes spatiales nouvelles lui permettant de s’incarner.

NFORMATIONS PRATIQUES
Mercredi 25 janvier à 18H30
Lieu : Archives municipales
1 place des archives, Lyon 2
Evènement gratuit sur inscription : 

Inscription en ligne ici https://forms.gle/QXCziUYyokutcfUU6

Pour toute information complémentaire concernant l'ouvrage : 
http://www.paysages-apres-petrole.org/a ... bien-etre/


Dans ce cadre, le collectif Paysages de l'après-pétrole propose également une visite le lendemain, jeudi 26 janvier de 9h30 à 11h00 du quartier réhabilité de la Duchère en compagnie des responsables de l'opération.
Rendez-vous : à la maison du projet, 12 bis place Abbé Pierre, Lyon 9ème art 
Inscription en ligne ici https://forms.gle/2xXyjBbaLqjFYxQ48

 
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar alecjcclyon » 30 janv. 2023, 23:08

Bonsoir,

Réaménagement du quartier de la Guillotière d'ici 2025 :
https://www.lefigaro.fr/lyon/lyon-les-e ... e-20230130
Proposition réseau tramway Lyon 2030 : https://www.google.com/maps/d/viewer?mi ... 00005&z=11
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar Chris69002 » 31 janv. 2023, 09:59

Au moins une chose, ils ont eu la bonne idée de pas reboucher des entrées de métro comme l'ancienne majorité avait eu l'excellente idée pour la station de métro Guillotière
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar xouxo » 31 janv. 2023, 11:41

C'est quoi cette histoire de reboucher les entrées de métro ? Je n'en ai jamais entendu parlé auparavant.
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar Chris69002 » 31 janv. 2023, 11:50

En 2004, ils ont condamné des entrées du métro Guillotière.
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar xouxo » 31 janv. 2023, 13:55

Merci pour l'info.
J'en profite pour coller le rendu qui est dans l'article du figaro :
Image
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Re: Urbanisme, périphérie, suburbia...

Message non lupar alecjcclyon » 31 juil. 2023, 21:09

Bonsoir,

Quelques informations sur la transformation de la rue Garibaldi d'ici 2025 : https://actu.fr/auvergne-rhone-alpes/ly ... 14483.html

Bonne lecture ! :)
Proposition réseau tramway Lyon 2030 : https://www.google.com/maps/d/viewer?mi ... 00005&z=11

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