Vincent Doumayrou a écrit :Du rail vu comme une alternative à l'autoroute
9 déc. 2017 Par Blog : Des Transports nommés soupir
Je reproduis ici le texte (un peu développé) de l'intervention publique que j'ai faite le 1er juillet dernier à la réunion des opposants à l'autoroute A45 (entre Lyon et Saint-Etienne) que souhaite réaliser Laurent Wauquiez.
Nous sommes réunis par notre opposition au projet d’autoroute A45, que défend M. Wauquiez. La question qui est posée aujourd’hui est de savoir si le rail peut être une alternative à l’autoroute.
Il convient de rappeler que le transport routier, à plus forte raison la voiture particulière, a ses atouts propres que le rail ne saurait toujours remplacer. 80 % de la population française possède une voiture, moyen de transport qui offre une disponibilité et une ubiquité permanente grâce à un réseau très maillé (en France, environ un million de kilomètres contre 30 000 km pour le réseau ferré). La route s’adapte bien aux trafics les plus diffus, et l’étalement urbain débridé que connaît notre pays la favorise. Même en Suisse, souvent décrit comme le paradis du rail, 75 % des kilomètres motorisés sont faits en voiture particulière.
Par conséquent, le rail n’est qu’une alternative relative à la route, la question est de savoir quelle proportion des flux routiers peut se détourner vers le train, pas de les détourner tous.
On parle ailleurs de mix (ou « bouquet ») énergétique : chaque source d’énergie a sa pertinence en fonction du contexte. De la même manière, les pouvoirs publics doivent mettre en place un « bouquet de mobilité ».
Mao-Tsé-Toung disait qu’il fallait descendre de cheval pour cueillir les fleurs : pour reprendre ses propos, non seulement le rail est une fleur à ramasser, mais il y a tout lieu de maximiser sa place dans ce bouquet. Le rail est un moyen de transport réputé très favorable à l’environnement. Selon les statistiques du CGEDD, quand on cumule les voyageurs et les marchandises, environ 10 % des trafics s’effectuent par rail en France pour l’année 2013. Or le rail ne consomme que 2 % de l’énergie consommée par les transports, et n’émet qu’1 % des gaz à effet de serre liés aux transports.
Ce matin pour venir vous parler, non seulement je me suis levé tôt, mais j’ai fait le trajet de Nancy à Givors : un trajet long de 448 km par la voie ferroviaire (source SNCF) et de 427 km par la voie routière (Michelin). Or pour un trajet de 427 km, selon les chiffres de l’ADEME, l’agence officielle française d’économies d’énergie, un trajet en avion émet 62 kg de CO2, un trajet en voiture 73 kg, un trajet en train classique 5 kg et un trajet en TGV 1 kg. L’autocar, moyen de transport auquel les milieux dirigeants de ce pays ne cessent de tresser des louanges, émet 25 kg, soit 5 fois plus qu’un train classique et 25 fois plus qu’un TGV.
Il se vérifie donc, selon les chiffres officiels des administrations françaises, que le train est beaucoup plus économe en énergie et émet beaucoup moins de GES que les autres moyens de transport pour un tel trajet.
Pourtant, le rail, qui devrait être « l’épine dorsale de la mobilité durable », selon la belle expression d’un dirigeant des chemins de fer marocains, fait l’objet d’un mépris de plus en plus ouvert de la part de la haute administration française. Durant le quinquennat précédent, à écouter la Ministre du Développement durable, la transition énergétique passe par la voiture électrique, et le Ministre de l’Économie a libéralisé le transport par autocar avec parallèlement un silence radio sur les conséquences pour le transport ferroviaire : il s’agissait d’un certain Emmanuel Macron. La SNCF accompagne cette « doctrine Royal-Macron » en lançant des services alternatifs au rail : derrière le verbiage sur les « nouvelles mobilités », elle contribue ainsi au déclin de son propre cœur de métier.
À ce mépris, s’ajoutent un certain nombre de phénomènes qui constituent un environnement très négatif pour le paysage ferroviaire français (PFF). Le rail disparaît non seulement des radars politiques, mais aussi des habitudes de vie de la population : en dehors de la capitale et de quelques grandes villes, la voiture particulière a une place monopolistique dans le mode de vie français, les autres transports (publics et ferroviaires, mais aussi le vélo par exemple) jouent un rôle résiduel. L’étalement urbain nourrit évidemment cette évolution.
Le fret ferroviaire a connu depuis l’an 2000 un effondrement de leur trafic à peu près sans comparaison en Europe ; en dehors des cas particuliers des Pays-Bas et du Luxembourg, seuls les pays de l’Europe périphérique (Grèce, Espagne, Irlande) font moins bien que la France en part de marché du rail. Même l’Italie, souvent considérée comme le type même d’une offre ferroviaire médiocre, fait mieux que la France de ce point de vue.
D’un autre côté, le réseau ferroviaire vieillit, la compétence technique au sein des opérateurs ferroviaires se dégrade, et l’offre se rabougrit. La SNCF réagit par une politique de marketing (inOUI…) qui se veut décoiffant, n’est qu’un cache-misère : le dynamisme commercial apparent camoufle l’attrition ferroviaire réelle.
Tous ces faits, en se cumulant, font peser une menace existentielle sur le réseau ferroviaire. Cela menace la crédibilité du rail comme alternative à la route.
La SNCF s’est spécialisée dans une niche – la grande vitesse ferroviaire. Ce week-end même 300 km (environ) de lignes sont inaugurés vers Bordeaux, et 180 vers Rennes, ce qui conforte la position de notre pays dans un « carré d’as mondial » pour la longueur de son réseau à grande vitesse avec la Chine, l’Espagne, et le Japon.
Évidemment, dira-t-on, c’est un progrès que de pouvoir relier Paris à Marseille en trois heures, Paris à Lille en une heure, etc. Je réponds oui, mais ce n’est pas le problème.
Le problème est que le TGV constitue un réseau en continuité, qui peut à peu aspire les trafics les plus rentables et assèche le réseau classique.
De plus, la SNCF considère le TGV non seulement un train qui va plus vite, mais comme un concept de transport à part entière qui fonctionne selon sa logique propre, de plus en plus divergente de celle du réseau ferré traditionnel. Voici ses principales caractéristiques : des lignes ultrarapides qui relient les grandes villes (principalement Paris) en un trait de temps ; un mode de commercialisation à réservation obligatoire et prix de marché, avec une hausse des contraintes d’utilisation ; des dessertes en majorité sans arrêt intermédiaire (en « point-à-point » selon la formule consacrée) ; des lignes qui convergent vers un point central unique, par où le voyageur est souvent contraint de passer : ainsi, pour aller de Nancy à Lyon, un seul aller-retour par jour permet par l’itinéraire direct via Dijon : le reste du temps, le passage par Paris est obligatoire. Cela permet d’améliorer le remplissage des rames, selon une logique proche des moyeux et rayons (« hubs and spokes ») du transport aérien, mais c’est une catastrophe pour l’aménagement du territoire… et pour la saturation des gares parisiennes.
Le système TGV tend à se rapprocher de l’avion, la SNCF à devenir une compagnie aérienne sur rail (dans son activité de trains de grandes lignes, dite SNCF Voyages selon la dénomination en cours… et en attendant la prochaine). Cela a une conséquence en ce qui concerne le sujet d’aujourd’hui : en se rapprochant de celle de l’avion, la logique du système TGV diverge profondément de celle de l’autoroute. En effet, l’autoroute est un système aux bretelles d’accès réparties harmonieusement sur le territoire, souple d’accès, moyennement rapide, et polycentrique : au contraire, le TGV est un système à peu d’entrées (une quinzaine de gares nouvelles sur un réseau de 2 700 km), d’accès compliqué, à point central unique et très rapide.
Il s’ensuit que le système TGV ne concurrence l’autoroute qu’à la marge.
D’un autre côté, la SNCF propose des trains régionaux, ce qui a pour conséquence qu’il n’y a plus qu’une offre résiduelle entre l’avion sur rail (le TGV) et le train de banlieue (le TER) : la notion de réseau national, qui suppose une desserte coordonnée du territoire, s’étiole.
Les trains régionaux sont dits TER en province et Transilien en Île-de-France. Naturellement, cette partition commerciale correspond à une partition de fait : le trafic est énorme en Île-de-France et très faible en province. Environ 70 % des trajets ferroviaires sont effectués à l’intérieur de la région capitale. On passe d’une soixantaine de trajets par an et par habitant en Île-de-France (et près d’une centaine si on inclut les RER de la RATP) à des chiffres le plus souvent inférieurs à dix dans les régions.
Cela s’explique par l’énormité de la région capitale, mais aussi par une offre en province souvent insuffisante voire rachitique, mis à part sur certaines lignes que les phénomènes démographiques favorisent spontanément : Metz – Nancy – Luxembourg, Strasbourg – Bâle, ou tout près d’ici Lyon – Saint-Étienne. Même certains territoires périurbains sont très insuffisamment desservis : ainsi, dans l’agglomération de Lille, pourtant l’un des plus grandes de France, la ligne entre Villeneuve d’Ascq et Orchies a fermé, alors que l’axe routier parallèle est embouteillé matin et soir, et une gare comme Pont-de-Bois, pourtant située dans l’agglomération de Lille à proximité d’un campus universitaire, n’est desservie que selon une trame squelettique.
Par ailleurs, la SNCF néglige les trajets de loisirs et la liste des lieux touristiques non desservis par le rail s’allonge (Le Mont-Saint-Michel, Le Mont-Dore, Vittel, Contrexéville, Gérardmer, Luchon…). Les plans gouvernementaux pour accroître la compétitivité touristique de la France se succèdent, mais le tourisme ferroviaire échappe complètement aux radars politiques.
Les comparaisons internationales sont souvent cruelles pour le PFF : ainsi, la gare principale de Toulouse a 15 millions d’usagers par an contre 40 millions à Brême et 70 à Hanovre.
Le PFF est affecté par la culture politique française et son appétence pour les grands projets à forte composante de technique et/ou de prestige, au détriment d’une réflexion sur leur utilité réelle et de toute stratégie d’ensemble. Ainsi, ici en Rhône-Alpes, nombreux sont les élus qui soutiennent le Lyon – Turin, mais les villes de Saint-Étienne et de Clermont-Ferrand ne sont plus reliées par la voie ferroviaire et la réalisation d’un RER à l’échelle de l’agglomération lyonnaise ou la mise en place d’une solution pour désaturer la gare de la Part-Dieu sont curieusement absentes des radars politiques.
L’idée que le TGV – l’idéologie du TGV – est la seule perspective d’avenir pour le rail fait consensus. Pourtant, de nombreuses liaisons ferroviaires interurbaines en Europe se font sans grande vitesse sans être des tiers-mondes ferroviaires pour autant, comme Stockholm – Göteborg, Vienne – Munich ou Londres – York – Édimbourg. Aux yeux d’une partie de la population française, en particulier sa fraction aisée, le TGV est le seul étendard de qualité, mais la qualité d’une desserte ferroviaire est un tout, où la qualité des fréquences, du service à bord, des correspondances, les tarifs, la souplesse d’accès, etc. compte autant que le temps de parcours et la vitesse « bruts ». Il est crétin de ne raisonner que selon la vitesse absolue quand on veut concurrencer l’automobile.
Pour conclure, voici quelques perspectives pour un transport ferroviaire qui soit une bonne alternative à la route ; sans surprise, il faut prendre le contre-pied des tendances au déclin décrites plus haut.
Remise en place d’un réseau de trains de grandes lignes classiques, très efficaces pour offrir une alternative à la route sur les distances moyennes ; par exemple, au départ de Lyon, il pourrait y avoir une liaison vers le Nord-Est (Luxembourg), avec arrêt à Villefranche-sur-Saône, Mâcon, Chalon-sur-Saône, Beaune, Dijon, Culmont-Chalindrey, Neufchâteau, Toul, Nancy, Metz, Thionville ; la reconfiguration de certaines sections du réseau selon une vitesse de 200 voire 230 km/h, une trame cadencée et un accès sans réservation obligatoire : un modèle autrichien ?
Désaturation des gros nœuds ferroviaires, comme celui de Lyon Part-Dieu ;
Construction, dans les grandes villes, de réseaux de type RER ;
Les lignes à faible trafic peuvent faire l’objet d’une réflexion touristique : en Suisse, les petites lignes sont exploitées selon une trame cadencée et vendue parfois parmi les pays émergents ;
Naturellement, les travaux d’infrastructure doivent faire l’objet d’une réflexion à part entière, il ne suffit pas d’aligner les kilomètres de réouverture sans politique commerciale et d’aménagement : densification des activités autour des gares, coordination entre trains régionaux, trains de grandes lignes, transports urbains, motorisation particulière ; effort sur la tarification notamment familiale, etc.
Quand j'ai écrit mon message plus haut, je n'avais pas connaissance de cet extrait. Il se peut que la ministre ait déjà évoqué la véloroute voie verte dans la logique décrite plus haut (un moyen de se rabattre vers des gares ou limiter les trajets courts sur l'A47 - je ne sais pas ce que représenteraient ces éventuels trajets courts).Gaël PERDRIAU, maire de Saint-Etienne, cité par France Bleu a écrit :"On a un gouvernement qui est totalement à côté de ses pompes. Entre péages urbains à l’entrée de la ville ou une piste cyclable entre Saint-Étienne et Lyon, ce sont des inepties.[...]
BBArchi a écrit :Je ne sais pas si l'idée d'une piste cyclable pour le trafic quotidien St Etienne Lyon à vélo est sorti de la base, d'une consultation, d'une idée de la France profonde, celle qui a du bon sens, mais j'avoue que si c'est le cas, je suis perplexe. On voudrait faire basculer les indécis dans le camp de l'A45 qu'on ne s'y prendrait pas autrement. Mais quelle idée ? Pour du cabotage, à la rigueur (et encore, tout dépend de la météo...). Descendre de Sainté à Givors ou Rive de Gier, no problémo. Mais le trajet retour, y'a de la pente. Çà côte, mine de rien, même en vélo électrique... et puis après, on fait quoi ? 2h1/2 ou 3h de vélo pour aller à Lyon, autant en sens inverse, il y a combien d'acharnés en excellente condition physique prêts à le faire tous les jours, parmi ceux qui sont dans leur voiture individuelle ?
On a également appris à mesurer la validité de la parole politique donnée par un gouvernement, surtout quand il est remplacé par des sensibilités 'autres'. Alors parole de ministre...
Est-ce que, quand tu proposes ton projet de tram-train, tu t'attends à des réponses du genre :BBArchi a écrit :Mais le problème de base est assez simple : on ne met pas tout le monde (utilisant exclusivement la voiture pour les trajets domicile>travail) sur un vélo, pour n'importe quelle distance, pour un AR ou plusieurs AR / jours.
Et si cela peut concerner un % des pendulaires, quid des artisans stéphanois (et vallée du Gier) bien contents de travailler sur Lyon et environs ? Quid des personnes en condition physique moyenne ? Des personnes qui n'ont pas de douche à dispo à l'arrivée, et qui sont soucieuses de leur confort perso (et pour une partie, du confort des collègues...) ? Et qui n'ont pas envie de bosser dans une ambiance de chien mouillé pour cause de météo pluvieuse ? Etc.
Je crois beaucoup plus à la réactivation de Givors Canal <> Brignais en TTOL[...]
nanar a écrit :A l'époque :
rester du côté de l'habitat et des activités, voire même passer au milieu, donc très accessible avec 5 ou 6 stations sur les 5 km, j'ai rajouté des propositions d'emplacements dans la google maps
Car c'était une idée de métro léger, pas de TER *
ne pas devoir croiser deux fois la chaussée Lyon -> Brignais de l'A450,
ne pas être obligé de faire des travaux au milieu du trafic,
ne pas avoir à riper les chaussées de l'A450 pour dégager un terre plein central.
Il me semble que tailler dans le talus nord est la solution la moins chère.
La ligne passait sous le remblai de la route de Charly, à niveau sur les parkings du CC St Genis 2, sous la route de Vourles, en tranchée dans l'espace vert des Basses Barrolles.
nanar a écrit : *Si Brignais Givors est remise en service payé par les contribuables locaux, et si ce tronçon longeant A450 construit, je n'estime pas souhaitable que ça soit Sncf Réseau qui possède et Sncf Mobilité qui exploite.
nanar a écrit :Ceci dit, une fois arrivé au raccordement des voies Sncf à Givors Canal, 9,5 km après la gare de Brignais, je ne sais pas trop ce qu'il conviendrait de faire.
nanar a écrit :Ceci dit, une fois arrivé au raccordement des voies Sncf à Givors Canal, 9,5 km après la gare de Brignais, je ne sais pas trop ce qu'il conviendrait de faire.
possession et exploitation.amaury a écrit :..Du point de vue du raccordement ou de la possession des infras / exploitation ?
Non, pas exactement :amaury a écrit :Pour le raccordement, l'objectif est de desservir la gare de Givors ville afin de permettre des correspondances avec les directions de Saint-Etienne (Firminy, Le Puy...) et Part-Dieu. Constatant que la voie Brignais - Givors arrive par le Nord et que l'accès aux voies desservant Givors ville nécessiterait un cisaillement complet, j'ai imaginé deux hypothèses :
[list][*]soit ne pas cisailler les voies à Givors Canal et créer des quais à Givors ville sur les voies qui partent en direction de la rive droite du Rhône
Règlement du PLUH du Grand Lyon a écrit :Cette zone à dominante résidentielle, regroupe les ensembles d'immeubles de logements collectifs dont les éléments bâtis revêtent des formes de plots, parfois de barres, en recul des voies, ordonnancés de façon discontinue au sein d'une composition paysagère où domine la végétalisation des espaces libres.
L'objectif poursuivi est de promouvoir, dans les sites appropriés, cette organisation d'habitat collectif dans un environnement paysager qualitatif et d’encadrer ces compositions urbaines existantes dans leur densité.
Cette forme urbaine se déclinant à différentes échelles de bâti, la zone comprend trois secteurs qui se distinguent par des variations de hauteur des constructions secteurs URc2a, URc2b et URc2c.
nanar a écrit :Visiblement c'est un élargissement (et pas une couverture) qui est en cours dans Givors, en prenant sur la rue qui bordait A47. https://www.google.com/maps/d/u/0/edit? ... 31806&z=19
Les bâtiments les plus près au nord ont été démolis progressivement, rendant inutile cette rue des Tuileries qui les desservait, et donnant assez de place pour des murs ou merlons antibruit protégeant le deuxième rang de maisons.
nanar a écrit :Reste à démolir 3 ou 4 hangars ou maisons et allonger les ponts routiers et de chemin de fer passant au dessus
Et le nouveau pont du Rhône à construire, annoncé en Préfecture ce 2 décembre.
L’A45 est enterrée depuis la caducité de sa Dup (Déclaration d’utilité publique) le 16 juillet. Deux ans auparavant, la préfecture de Région avait lancé une « démarche globale d’amélioration de la mobilité dans le corridor entre Saint-Étienne et Lyon » bénéficiant des 400 M€ promis à l’origine par l’État pour l’A45. Après avoir détaillé, mercredi, l’idée d’un nouveau pont routier sur le Rhône, puis ses projets routier ferroviaires, place ce vendredi au débat politique qu’elle suscite.
Peut-on cette fois y croire ? Pro et anti A45 peuvent légitimement se poser la question au regard du grand écart entre annonces et concrétisation à propos de l’ex-serpent de mer autoroutier. Rappelons, pour ne citer que ces épisodes marquants, l’assurance successive quant à sa réalisation donnée en personne par deux présidents de la République, Nicolas Sarkozy et François Hollande aux Ligériens partisans du projet, lors de visites dans la Loire. Maintenant que l’État travaille à concevoir (ou à y intégrer des projets déjà élaborés) une batterie d’alternatives, ira-t-il jusqu’au bout ? Logiquement, la ligne de partage des politiques ligériens à ce sujet se calque, à chaque fois ou presque, sur celle qui les divisait à propos du projet autoroutier. Ses « ex »-opposants parlent volontiers de leur optimisme. Ses « ex »-partisans moins facilement de leur pessimisme : ni la majorité de Saint-Étienne Métropole, ni celle de la Région n’ont répondu à nos sollicitations. Une problématique centrale que confirment, en revanche, tous les politiques interrogés : pour financer les alternatives, l’État ne compte pas que sur la seule réutilisation de ses 400 M€ autrefois dévolus à la feu A45 mais aussi, au moins en partie, sur le cumul des aides qu’avaient promis la Région, Saint-Étienne Métropole (qui jusque-là continuent à officiellement boycotter la démarche) et le Département, soit 393 M€. Sauf que les trois collectivités ne l’entendent pas de cette oreille…
Régis Juanico, député de la Loire (Génération.S) : « Contrairement à l’A45, les planètes sont alignées et surtout, il y a des élus motivés, côté rhodanien »
Opposant à l’A45, le député stéphanois estime que « ce qui s’élabore aujourd’hui a tiré les leçons d’autrefois. Il y a besoin d’échanges, de compromis entre les élus de la Loire et du Rhône. On a, par le passé, perdu beaucoup de temps à ne pas se rencontrer. Avec la démarche entreprise depuis 2 ans par la préfecture de région qui a reçu carte blanche de la part de l’État, c’est tout le contraire et on avance. Alors, oui, on peut y croire. Contrairement à l’A45, les planètes sont bien alignées pour la concrétisation de ces alternatives et surtout, il y a des élus motivés, côté rhodanien : des parlementaires, ceux du Grand Lyon, le président du Département… La grande différence avec l’A45, c’est cette unanimité. Même si la Région et Saint-Étienne Métropole continuent à officiellement bouder la démarche, des techniciens de la première y sont présents et des élus de la seconde, maires de l’Ondaine et du Gier, aussi. Il faut que ces deux collectivités et le Département accordent leurs financements prévus à l’origine pour l’A45. Sans cela, il se fera quand même des aménagements mais de moindre ampleur. Département du Rhône et Métropole de Lyon vont contribuer. Alors, je suis convaincu qu’ils reviendront à plus de pragmatisme. »
Georges Ziegler, président du Département de la Loire (LR) : « Il ne faut pas compter sur notre ex engagement financier pour les alternatives »
Côté Département de la Loire, le boycott de la démarche préfectorale semble fini depuis déjà dix mois. Mais celui financier reste d’actualité. Son président, Georges Ziegler, l’a répété à IF Saint-Étienne cet été : « Nous comptions effectuer un emprunt de 131 M€ sur 50 ans pour l’A45 et seulement pour l’A45. La parole de l’État n’a pas été respectée, le projet ne se fera pas, nous ne contracterons donc pas cet emprunt. Il ne faut donc pas compter sur notre ex engagement financier pour les alternatives évoquées, nous préférons poursuivre notre désendettement. »
Jean-Luc Fugit, député du Rhône (LREM) : « Il est désormais urgent que tout le monde vienne s’asseoir autour de la table »
Le député de la 11e circonscription du Rhône, celle du canton Givors, est plus qu’un voisin. Longtemps enseignant-chercheur et vice-président de Jean-Monnet, cet ex responsable du PS ligérien a habité Grand-Croix et connaît bien la problématique vue du côté de la Loire. Opposant à l’A45 – « mauvaise réponse à un vrai problème » -, il fait partie de ces élus rhodaniens qui ont pris place autour de la table avec la motivation qu’évoque plus haut par Régis Juanico. Le parlementaire a été un des rapporteurs de la loi d’orientation des mobilités (LOM) et est membre de l’instance consacrée au nœud Ternay/Givors. « Oui, je crois à la concrétisation des alternatives. Parce que les 400 M€ de l’État sont inscrits dans la LOM. Parce cette fois, de nombreux élus, techniciens des deux départements et de l’Etat travaillent la main dans la main sur l’articulation d’aspects routiers, ferroviaires et intermodaux quand l’A45 focalisait les oppositions politiques et géographiques. Les Rhodaniens ont compris leur intérêt et on raisonne davantage sur un grand bassin de vie de 2 millions d’habitants aux enjeux communs. La présence en tant que politiques aux réunions donne un signal de bienveillance à la démarche et entretient de l’exigence, une certaine pression. Alors, il est désormais urgent que tout le monde vienne s’asseoir autour de la table. Une fois les régionales 2021 passées, il n’y aura pas d’élection locale avant 2026. Ce qui libère du temps pour construire. »
Hervé Reynaud, maire de Saint-Chamond et vice-président de Saint-Étienne Métropole (LR) : « Essayons d’être constructifs mais ce grand fourre-tout laisse sceptique »
« On nous accuse de mauvaise volonté ? Il ne faut pas retourner les choses ! » Même s’il s’exprime là en tant que maire de Saint-Chamond, Hervé Reynaud justifie le boycott de la démarche sur les alternatives comme « une décision cohérente de la part de Métropole de la Région et du Département. Avant de discuter « d’alternatives », nous souhaitions que l’État ait le courage d’assumer officiellement sa décision et ne se contente pas de 2 ans de « signaux ». Ça n’a pas été le cas. Ce ne l’est toujours pas puisque malgré la caducité de la Dup en juillet, l’État n’a même pas lancé la procédure permettant de libérer l’utilisation des terrains bloqués par l’A45 ! Maintenant, les choses vont bouger au sein de Métropole, nous allons nous consulter et oui, j’irai désormais à l’instance qui concerne les vallées de l’Ondaine et du Gier. Il faut de toute façon fluidifier et sécuriser la liaison Saint-Étienne/Lyon. Alors essayons d’être constructifs, même si je ne crois pas au travail enclenché. Pour l’heure, je n’ai pas lu des alternatives mais un listing d’idées, un grand fourre-tout qui laisse sceptique, notamment sur ses financements très flous. Quant à la participation de Métropole, il ne faut pas compter sur les 131 M€ : ils ne sont pas provisionnés. Il s’agissait d’un projet d’emprunt obtenu à taux avantageux pour la seule A45, choix de responsables élus représentant la population. »
Jean-Michel Mis, député de la Loire (LREM) : « Rester sur une posture A45 ou rien, c’est facile et contreproductif »
Le député stéphanois a longtemps un défenseur de l’A45. Aujourd’hui, par la force des choses, « j’ai évolué, comme le pays. La loi d’orientations des mobilités (LOM) a changé beaucoup de choses et je siège donc à l’instance sur l’amélioration RN88-A47. Rester sur une posture A45 ou rien, c’est facile à tenir et contreproductif. La politique de la chaise vide ne sert pas à grand-chose, sûrement pas à l’intérêt général. Si les collectivités de la Loire et la Région ne donnent pas de financements comme elles le souhaitaient pour l’A45, alors il y aura moins de réalisations, forcément. La sanctuarisation des 400 M€ accordés par l’État sur ces alternatives est, elle, garantie : en termes d’inscription et de fléchage de la somme, l’A45 n’a jamais eu l’équivalent. Le nouveau ministre des Transports, Jean-Baptiste Djebbari ne diverge pas de sa prédécesseur. Enfin, la démarche actuelle fait appel à toutes les sensibilités, elle est beaucoup plus large qu’à une époque où les présidences de Métropole, Département et Région montaient à Paris défendre, seules, l’A45. »
Dino Cinieri, député et conseiller régional (LR) : « Pour l’instant, ce ne sont que des « réunionites »
Sollicité pour connaître l’avis de la Région, le conseiller régional et député LR pro A45 Dino Cinieri, ne se montre qu’à peine plus loquace que sa présidence : « La position de la Région, c’était l’A45. Quant à ce travail sur les pseudo alternatives, je n’y crois pas. Pour l’instant, ce ne sont que des « réunionites », on se prononcera quand il y aura du concret, des projets chiffrés. »
Jean-Charles Kohlhaas, vice-président aux déplacements de la Métropole de Lyon (EELV) : « Prêts à mettre de l’argent dans les aspects ferroviaires et intermodaux. »
Si la présence des Rhodaniens depuis 2 ans sera décisive selon les défenseurs de la démarche, qu’en pense la nouvelle majorité écologiste de la Métropole de Lyon ? « Nous avions suivi les débats et serons bien présents aux réunions, dès ce vendredi pour l’instance sur le nœud de Givors-Ternay, répond Jean-Charles Kohlhaas, vice-président aux déplacements. S’il y a bien une vision globale de la problématique, nous avons quand même le sentiment que cela va plus vite sur le volet routier. Nous ne sommes pas forcément opposés à un nouveau pont sur le Rhône avec toutes les garanties que cela doit avoir pour l’impact sur la population, ni à la sécurisation et la fluidification des axes comme l’A47. Mais nous n’avons pas à financer ces projets-là. On a parlé de la Métropole pour doubler l’axe Brignais/Beaunant et réaménager la sortie Solaize sur l’A7 ? L’abandon de l’Anneau des sciences a rendu caduc le premier projet. Pour le second, il n’est pas question de substituer à l’État surtout avec les portions d’A6 et d’A7 qu’il nous a transmis dans un état lamentable et dont il exige la mise aux normes.
En revanche, nous avons rencontré la préfecture la semaine passée pour signifier que nous sommes prêts à mettre de l’argent – et beaucoup – dans le ferroviaire et l’intermodal. Déjà avec plusieurs dizaines de millions pour l’extension du tram train de Brignais à Givors.
Cela permettra de diminuer la pression automobile sur Givors. Nous voulons aussi contribuer à l’amélioration sur notre territoire des lignes ferroviaires Saint-Étienne/Part-Dieu et Saint-Étienne/Givors/Perrache, mise à mal par une réduction de la fréquence en 2016. On peut déjà être sollicité hors compétence. Mais la loi va amener une nouvelle mouture de l’établissement public qu’est le Sytral en 2022 intégrant infrastructures et exploitation du ferroviaire, en lien avec la Région. Une sorte d’Île-de-France Mobilités à l’échelle lyonnaise. »
Après l’abandon de l’A45 et en application de la loi d’orientation des mobilités, l’État souhaite soutenir une démarche d’amélioration des déplacements entre Saint-Etienne et Lyon , notamment sur l’axe A7-A47. Et la RD 342 (Mornant-Tassin), un axe très fréquenté (10 000 à 16 000 véhicules/jour), fait figure d’itinéraire de délestage.
Des travaux sont donc entrepris par le département pour fluidifier, améliorer la sécurité et renforcer son utilisation pour les transports en commun et le covoiturage. L’État prendra à son compte 33 % du budget (9 millions), soit 3 millions d’euros (HT), comme cela a été annoncé lors de la séance du dernier conseil départemental.
Trois tranches de travaux
Cela concerne essentiellement trois opérations. Tout d’abord des études et des travaux d’aménagement, qui sont en cours, dans le secteur des Sept Chemins (2020-2021). Cela comprend la réalisation d’un parking de covoiturage au carrefour de la RD 342 et la RD 36.
Ensuite, il s’agit des travaux de deux carrefours entre la RD 342 et la RD 83 et entre la RD 342 et la RD 63, qui devraient débuter en 2023. Une phase d’étude intégrera une liaison de bus à haut niveau de service jusqu’aux Hôpitaux Sud (ligne B du métro).
Enfin, dernière tranche évoquée, des travaux d’aménagement de la section de la RD 342 entre la RD 34 et la frontière avec la Loire (recalibrage, création d’accotements).
FORET a écrit :On va en revenir a l'axe "historique" que nous les anciens avons connu pour aller à Saint Etienne et qu'on appelait la route des montagnes russes appellation que seuls les lyonnais d'un certain age ont encore en mémoire....
maxc19 a écrit :FORET a écrit :On va en revenir a l'axe "historique" que nous les anciens avons connu pour aller à Saint Etienne et qu'on appelait la route des montagnes russes appellation que seuls les lyonnais d'un certain age ont encore en mémoire....
Je te rassure j’ai 24 ans et j’ai toujours appelé cette route les montagnes russes
amaury a écrit :Ces différents impératifs mis bout à bout, les premiers sujets qui sortiront seront, logiquement, ceux qui avaient déjà fait l'objet d'études. Pour autant, il ne faut pas jeter bébé avec l'eau du bain ! La démarche va certainement permettre d’avancer sur le ferroviaire Lyon / Saint-Étienne et l'amélioration de l'intermodalité le long de l'axe. Les études techniques sont en cours pour les UM3, le retour des semi-directs sur Perrache - Givors ou encore l'ouverture de haltes dans la vallée du Gier.
man-x86 a écrit :Vu le traffic, l'idéal serait d'avoir une troisième voie en IPCS là où il y a la place
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