Bonsoir. Désolé, j'vais être un peu long...
Je reste toujours un peu surpris des réactions relativement épidermiques (enfin, celles que les différentes rédactions « intéressées » laissent délibérément sur leurs sujets ouverts aux commentaires) qui ont fleuri en nombre sur ce mouvement qualifié de grève.
A ma connaissance, l’exploitation à agent seul est certes déroulée partout sur les TER selon un principe validé, estampillé ‘cholestérol free’ par les différentes instances, présentées comme évidentes et pratiquées depuis plus de 40 ans (40 ans… P...n!) en IdF sans que cela provoque de gros problèmes (il paraît), mais en permettant de sérieuses économies d’échelle en contrepartie du rognage à la marge de quelques dispositions de sécurité et de capacité d’adaptation et de réaction.
Et si le problème, justement, était que ces dispositions imposées finissent par se révéler préoccupantes à la longue, finalement ?
En rembobinant le film, les voix qui s’étaient élevées contre (et qu’on a soigneusement [s]réduit au silence[/s]mis en minorité) étaient portées par des gens ‘normaux’, mais considérés officiellement comme des abrutis un peu limités sur le plan de la perception des réalités économiques. Et pourtant, il y a quarante ans, les remous étaient nombreux
Alors bien sûr, revenir brutalement en arrière (mais pas au sens retour à l’age des cavernes…) est quasiment irréalisable, ne serait-ce que sur le plan économique, justement. Mais il est utile de se poser la question de la pertinence au bout de cette période, question qui au demeurant, ne semble pas totalement déconnante. Est ce toujours d’actualité, ou bien est ce qu’il ne serait pas temps de reconsidérer les choses calmement ?
La meilleure preuve : l’inspection du travail, qui, est un fait connu, est un repaire de
dangereux activistes de l’ultracentre prompts à mettre tous les bâtons dans les roues des audacieux entrepreneurs, vient de prendre une décision qui va faire jurisprudence, en quelque sorte :
https://www.lunion.fr/id103106/article/ ... seul-agentCe n’est pas rien, surtout compte tenu des agitations et pressions diverses actuelles...
Parenthèse sur les événements des 3 derniers jours. Il est tout de même audacieux d'évoquer un droit de retrait plus de 48 heures après un accident dont il faut rappeler que l'AGC n'est pas le fautif, mais le conducteur du convoi exceptionnel qui a pris une route qui lui est interdite.
D'où une première conclusion : s'il n'y avait pas eu de camion sur le PN, les syndicats n'auraient pas hurlé à l'atteinte à la sécurité. Sérieusement ?
Mais le problème qui me heurte violemment
(sans jeu de mots), c’est le déroulé de l’accident, révélateur du vrai problème : après le badaboum, le conducteur s’est retrouvé seul pour assurer la sécurité de ses passager EN ETANT BLESSE. On a eu du bol, il ne s’est pas retrouvé inconscient dans sa cabine, et il a assuré.
Sur la route, en cas d’accident, il y a en principe du monde qui arrive sur les lieux et qui prend en charge, bien ou mal, la situation, prévient les secours, etc. En Auvergne / Limousin, cela devient un peu plus compliqué, il y a moins de monde qu'en IdF
Dans le ferroviaire, il se passe quoi ? Le personnel est
seul dans les minutes qui suivent

... et la radio est dans le secteur du matériel complètement dévasté dans l'impact (ça aussi, spéciale dédicace aux concepteurs et rédacteurs du cahier des charges !)
Pour les accidents aux PN, on va dire que dans la plupart des cas, c’est le contexte routier qui s’applique, mais… qui pense à prévenir le monde ferroviaire par le téléphone de terrain, s’il n’est pas explosé dans l’accident ? Le smartphone ne fait pas tout, successivement le contact de la gendarmerie, qui essaiera de comprendre où ça se passe, puis contactera ensuite le responsable identifié de la SNCF du coin, qui fera ensuite le nécessaire : le temps de réaction est critique
A la limite, on en a rien à secouer du fait que le conducteur du TE (Transport Exceptionnel) ait pu faire n’importe quoi, y compris (et l’enquête dira ce qui s’est passé) se planter, sciemment ou non, pour rattraper une connerie initiale, et c’est son problème, pénalement. Le vrai problème, c’est qu’on ne sait toujours pas, en l’état actuel de la situation, sécuriser la totalité des interfaces entre monde routier et monde ferroviaire, et qu’aucun indice montre la possible réalisation de cet objectif !
Et donc, syndicat ou pas, les hurlements n’auront jamais la moindre efficacité sur la survenance inopinées de commission d’infractions, sur les erreurs de conduite, sur les pannes et foutraqueries du GPS (et je confirme que ça arrive, y compris sur les versions spécifiques camions / poids lourds / TE)…
Et la situation risque fort de se reproduire, malheureusement…
On en reparle, de l’accident de TOSSIAT, dans le 01 ? A l'issue du traitement du 'problème' qui s'était posé, il ne devait plus y avoir de reproduction de ces circonstances, avec une sécurisation accrue des procédures de circulation des TE, en fait...
Alors retrouver ce cas de figure d’accident, avec le risque de suraccident qu’on a réussi à éviter de justesse, et continuer à laisser à une seule personne la responsabilité de la situation après l'accident, ça coince ; et le droit de retrait devient plus que logique, puisque tout a été fait pour appliquer cette tendance à l’agent seul malgré les alertes (depuis 40ans)
Sinon, il y a l'option de supprimer toutes les lignes, et de laisser le monde civilisé routier s'expliquer entre soi.
Ensuite, il est comique de constater que les Transilien ont été très impactés pendant 3 jours. La conduite à agent seul y a été introduite il y a plus de 40 ans et s'avère la norme depuis plus de 10 ans (il restait quelques vieux coucous non équipés jusqu'à l'arrivée du Francilien). Quant aux TGV et aux IC, ils ne sont pas concernés. Donc hors sujet.Si on pouvait résumer à la hache, pour une fois... le Transilien, ce n’est pas du train. C’est un
super métro, circulant à l’extérieur ou comme les taupes, c’est tout. Le « modèle métro urbain » a simplement été transposé aux Transiliens… avec la même configuration en terme d’ambiance, de technique, d’espace perceptible par les clients : empilement de foule, ambiance crade et anxiogène, horaires réguliers / cadencés, charte graphique assez proche, temps de parcours ‘réduits’ donc pas de toilettes, etc. L’agent seul dans ce cas est presque la poursuite d’une logique à part entière, le transilien, c’est comme un gros ascenseur horizontal, quoi…
Accessoirement, il reste combien de PN actifs sur l’ensemble des lignes concernées, susceptibles de rencontres ?
D'où une deuxième conclusion : il y a peu de chances pour que la grève ait un lien avec l'événement origine mis en avant.Je ne sais toujours pas si le mouvement correspond à une grève. Même si je n’ai aucune légitimité à parler au nom des cheminots, ce que j’en connaît et qui est certain, c’est qu’il semblerait que ce soit ‘juste’ l’incident de trop au bout d’une accumulation de petits détails / situations à risque ou anxiogènes pour l’ensemble des personnels de conduite, mais évités de justesse ou résolus avec des solutions acceptables en permettant la poursuite sans casse.
Et ça, partie cachée de l’iceberg, personne n’en parle : dans la presse, ça fait moins d’audience que d’avoir plusieurs ambulances qui flashent, des brancards, etc. C’est moins glamour et convenu d’en parler plutôt que de « taper sur des feignasses toujours en grève ». C’est pourtant une réalité forte.
Je continue : si on revenait en arrière et qu'on généralisait à tous les trains la présence d'un agent commercial, la propension à constater la présence de celui-ci soit en cabine avec le conducteur, soit en cabine arrière à bouquiner, soit dans un espace qu'il se réserve (les 8 places semi-fermées derrière la cabine d'un AGC), serait en proportion au moins équivalente à celle d'aujourd'hui. De mémoire, sauf en cas de dérangement de la veille automatique, les ASCT n'ont pas à rester à demeure en cabine active.Ben c’est juste un point d’amélioration et de gouvernance à remettre à plat, comme dans n’importe quelle entreprise, dans le but d’améliorer la sécurité, le process de production, etc.
Le propos démontre uniquement qu’une action précise, continue, forte et dirigiste auprès du personnel serait LA solution à mettre en œuvre pour éviter justement que ce type de situation perdure.
Un ASCT, c’est fait pour Haessecéter. Point. Pas pour larver sur un fauteuil en allers retours dans une situation à risque :
C’est fait pour faire rentrer les sous quand il n’y a plus de guichet pour vendre des billets
C’est fait pour secouer les abrutis qui mettent le bronx parce que personne n’a pensé à leur donner les codes
C’est fait pour apporter les réponses aux inévitables questions qui se posent
(En IdF, le combat est perdu d’avance ; mais pour les autres régions, rien n’est complètement perdu)
C’est fait pour que les gens ne passent pas sous le train au démarrage pour tout un tas de mauvaises raisons
Et il n’y a aucune raison pour que les quelques ASCTqui se risquent sur ce comportement limite fassent porter à l’ensemble de leur collègues qui font le taf une considération injustifiée
Donc ça se gère, y compris en terme de définition de profil de poste, de règles de comportements en service, d’incitations positives à la motivation, et de contrôle aussi ; c’est la partie intégrante de toute gestion de personnel ! Quitte à ce qu’il y ait des voyageurs témoins pour l’évaluation … Comme il se pratique pour les restaurants, avec des inspecteurs témoins ; ça ne doit pas être trop compliqué à organiser
Pour revenir sur la veille automatique : agent seul, pas de veille, pas de train. Avec un ASCT, le train continue (en principe). C’est simple. A agent seul, pas de train. On fait quoi des clients ? On les dissout dans l’acide ? Comme on n’est pas des méchants, on se contente de les poser sur le quai ?
D'où cette troisième conclusion : s'il y avait eu un second agent, il n'est pas impossible que lui aussi ait été blessé. Ce qui aurait changé quoi par rapport au sujet ?Statistiquement, compte tenu de l’accidentologie en ligne (cas du choc frontal avec un obstacle sur la voie) quel serait le risque d’une mise en PLS en cas d’accident de deux agents, probablement plus faible qu’une mise en PLS de l’agent seul ? cela mérite réflexion… Et puis l’ASCT n’a rien à faire à l’avant du train (
comme la radio d’ailleurs) en service normal.
Accessoirement, on ajoutera que la généralisation d'un second agent serait aussi un bâton tendu par les syndicats pour que la direction promeuve une conversion plus fréquente encore des dessertes à l'autocar qui, lui, est exploité à agent seul.La encore, l’acceptabilité d’accident d’autocar me paraît un critère à prendre en compte. Mais je confirme que vu les prix pratiqués, j’attends moins de sécurité dans un autocar que dans le train.
Mais de toutes façon, pas de souci : il est évident que le passage au car est programmé quoi qu’il arrive...
Morale : tout ceci ressemble à un tour de chauffe avant l'hiver. Oui, probablement.
Ou bien c’est l’expression de l’arrivée à un point limite vis à vis de l’ensemble des pratiques anxiogènes dans la maison (fermetures de lignes, suppression de services, abandons de clients en rase campagne, politique tarifaire iconoclaste, etc.), un peu à une échelle différente mais proche dans le mécanisme, comme l’éclosion spontanée du mouvement de ras le bol à l’automne dernier (70 % de français concernés par les critiques et remarques exprimées par le mouvement cristallisé autour des ronds points… ; mais ça a changé depuis, vu le traitement médiatique fait, qui masque la forme sans régler le fond)
* : chiffre au conditionnel, à vérifier et croiser avec les statistiques disponibles sur le site OpenSource de la SNCF